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Majlisse_el_Chi'ir_à_la_coue_d'Al-Hakam_

976
Les splendeurs de Cordoue

À l'automne 976 (l'an 377 de l'Hégire), le Calife Al Hakam II se meurt des suites d'une attaque cérébrale. Mais Cordoue, sa capitale andalouse, n'a jamais été si belle, si savante, si artiste. 

Où que se posent les yeux, où que s'élève l'esprit, le spectacle de la plus grande ville d'Europe, l'une des plus merveilleuses du monde, étonne et fascine. 

Que valent les mots d'une description d'architecture pour rendre compte de l'émotion face à de telles merveilles ?

Faut-il évoquer la grande mosquée de Cordoue ? Elle fut construite sur le site de  l'église wisigothique de Saint Vincent, à l'emplacement de l'antique temple de Janus, près du Guadalquivir et des remparts de la ville. De nombreux émirs et califes ont agrandi et embelli l'ensemble architectural. Al Hakam, encore héritier du trône califal, double la surface de la mosquée, dote le mihrab et la coupole centrale de décors végétaux somptueux sur fond d'or, réalisés par des artistes byzantins appelés par le Prince.  Il achève également la "Medinat az-Zahra" dans la banlieue ouest de la capitale : littéralement "la ville des splendeurs". C'est une ville palatiale réservée au gouvernement du Califat.


Plus impressionnant encore, la ville est équipée de tous les aménagements urbanistiques possibles à cette époque : rues pavées (la première de la péninsule ibérique), système de circulation publique de l'eau dans toute la ville avec y compris des égouts, éclairages publics qui vaut l'exclamation d'un poète. Il compare la voie illuminée qui conduit à Médinat az-Zahra à " à un collier de perles qui décorait les jardins et vergers des faubourgs de Cordoue ".

Et que dire de sa politique culturelle ? Durant le règne du Calife, 27 écoles publiques et gratuites sont fondées, L'enseignement est décrété obligatoire pour tous les enfants ! 900 ans avant les grandes lois des différents états européens à ce sujet ! Mais la réalisation la plus remarquable du Calife, c'est la fondation et l'ampleur de la bibliothèque de l'Université : les chroniqueurs rapportent le chiffre fabuleux de 600 000 volumes ! Même si les critiques proposent de revoir leur nombre à 400 000 (sur quelle base ?), la réalisation au regard des standards de l'époque est vertigineuse. Aux temps de sa magnificence, des copistes, des poètes et des savants sont recrutés pour reproduire et classer tout le savoir et toute la création du monde. Les poétesses Lubna et Fatima comptent parmi les plus célèbres. Et que dire de l'équipe de 170 lettrées  (femmes sachant lire et critiquer les textes qu'elles reproduisent) dans un seul faubourg de la ville ?

Cordoue est sous ce règne la capitale la plus resplendissante pour son rôle politique, mais aussi artistique et culturel. La culture est offerte à toutes et à tous.  Les femmes y sont respectées, honorées et instruites comme nulle part en Europe ou en Méditerranée. Mais la mort d'Al Hakam met fin à cette apothéose : la minorité de son fils, les manœuvres brutales du Général Al Mansour, la censure et le pillage à la bibliothèque par des intégristes incultes, toutes ces formes de régressions sonnent le glas de cette merveilleuse époque. L'an 377 de l'Hégire date l'optimum de la culture arabo-andalouse et mondiale, avant que les ténèbres n'envahissent la péninsule et l'univers entier.

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