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Voyageurs à Venise

 

   Venise a toujours été une ville de voyageurs. Marchands, pèlerins, diplomates, artistes et écrivains s’y sont pressés au fil des siècles. On venait de toute l’Europe et bien au-delà pour découvrir ce miracle de pierre dressé au milieu de la lagune, pour s’émerveiller de ses palais et de ses églises, ou pour négocier dans ses marchés où l’Orient et l’Occident se rencontraient. La Sérénissime n’était pas seulement une cité, mais un carrefour, un miroir du monde.

   Parmi ces voyageurs, certains ont laissé des récits qui continuent de nourrir notre mémoire de Venise. Marco Polo, fils d’un marchand vénitien, porta ses pas jusqu’en Chine, y vécut 24 ans et rapporta dans son Livre des merveilles une vision de l’Asie qui allait marquer des générations entières. Goethe, lors de son Voyage en Italie en 1786, décrivit la lumière unique de Venise, la splendeur de ses peintures, l’harmonie de son art. Chateaubriand, dans ses Mémoires d’outre-tombe, évoqua la mélancolie d’une ville déchue mais toujours splendide. Plus près de nous, Proust fit de Venise une étape initiatique dans sa Recherche du temps perdu, ville d’art et de mémoire où l’expérience esthétique devient souvenir. Thomas Mann enfin, dans La Mort à Venise, donna à la cité le visage ambigu de la beauté et de la décadence.

   Chaque regard, chaque récit transforme Venise. Pour Goethe, elle est un lieu d’éblouissement ; pour Chateaubriand, un tombeau glorieux ; pour Proust, une révélation intime ; pour Mann, un décor tragique. Et pourtant, tous parlent de la même ville : une cité fragile, insaisissable, toujours recommencée dans les mots de ceux qui l’approchent.

 

   Ainsi Venise ne vit pas seulement dans ses pierres et dans sa lagune. Elle vit aussi dans ces récits, qui font d’elle une ville universelle, une ville rêvée autant que réelle. Voir Venise, c’est aussi lire les voyageurs qui l’ont regardée avant nous, et entrer dans ce dialogue de siècles où chacun a trouvé, dans la Sérénissime, un reflet de lui-même.

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