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    Phonétique du chinois mandarin

     Loin des fausses impressions sur la complexité du chinois, il existe bien une réelle difficulté guettant le néophyte qui veut devenir sinologue. Elle ne se trouve pas nécessairement dans la profuson des caractères, mais sur sa phonétique : d'une part, les tons, en Europe, expriment l'émotion, voire l'interrogation, par laquelle le locuteur exprime son message ; en mandarin moderne, les tons (au nombre de quatre plus le ton neutre), sont parties prenantes de l'identité des caractères et des mots. D'autre part, le système vocal (voyelles et consonnes) est profondemment différent de ce que nous connaissons dans les langues latines ou germaniques.





     Commençons par le système vocal. Il est composé de 21 consonnes, de trois "liquides", de 4 voyelles. Le tableau suivant permet de ranger les consonnes par familles phonétiques, avec si possible les sons français.


 
 








 
 



     Les voyelles simples sont au nombre de quatre : A, O, E et Ê (je vous présente en dernier les "liquides" qui se prononcent Y, Ou ou Û). Il n'y a rien à dire sur le A voyelle, semblable au A français. O se prononce comme comme O-A en une seule respiraration, un peu comme notre OI moderne de Roi - Loi etc., ou WA en écriture anglaise : 我 (je, moi, mien...) se prononce comme Woâ ou Ou-OA. Le E se prononce comme un É quand il est suivi de I ou de N, comme un EU s'il est suivi d'un R (ER pinyin se prononce alors comme un EUHH), enfin comme un EN quand il est suivi d'un N (le ENG pinyin se prononce alors comme pour notre EN+N+G).

     Les "liquides" (mi voyelles mi consonnes) sont au nombre de trois. U (prononcer OU de ouate), le Ü se prononce comme notre u français dans tumulte. I se prononce de deux manières différentes : après les consonnes s, c et z, sh, ch et zh, plus le r (donc ces sept lettres du pinyin), I se prononce comme un "euh" bref. Il se prononce comme le Y de hyène après les autres consonnes.




     Le chinois mandarin se prononce avec quatre tons (plus un ton neutre). Ils font partie de l'identité des caractères et des mots (je sais, je me répète, mais c'est absolument capital). Il n'est pas possible pour un Chinois de confondre shì ( : être) et shí ( : le temps) ou xiǎo ( : petit) et xiào ( : l'école). Les quatre tons sont :
 
- Le premier ton,   le ton haut (comme pour zhī, : pronom possessif)
- le deuxième ton, le ton ascendant (comme pour shí, : le temps),
- le troisèème ton, le ton infléchi (comme pour zhĭ, : seulement, mais)
- le quatrième ton, le ton descendant (comme pour shì   : être).

     Il est possible de comparer les tons du mandarin à des successions de notes de musiques, sur l'espace d'une demi-octave. Si nous convenons que le ton haut correspond au Do-4 du solfège, le ton ascendant est un crescendo du La-3 au Do-4, le ton infléchi la succession d'un decrecendo Do-Sol suivi sans interruption d'un crescendo Sol-Do. Le ton descendant est un decrescendo Do-Sol, prononcé de manière très brève et sèche comme un ordre impérieux en français (comme quand vous intimez un "non !" catégorique).

     De plus, certains caractères peuvent se prononcer avec le même son mais un ton différent, pour exprimer un autre mot, ou parfois une nuance : le caractère 中 désigne le nom le centre, le milieu s'il se prononce avec un ton ascendant (zhóng) ou le verbe frapper s'il est prononcé avec le ton descendant (zhòng). 

     À titre ludique, les Chinois, qui sont conscient des assonances et des confusions possibles, s'amusent à élaborer des jeux de mots avec des termes de même prononciation et des tons différents. Le poète et linguiste contemporain Zhào YuánRèn a composé ainsi une fable, un peu comme une de nos virelangue, avec de nombreux mots shī, shí, shǐ et shì. Il a produit la pièce suivante, de 92 caractères :

石室诗士施氏,嗜狮,誓食十狮。
氏时时适市视狮。
十时,适十狮适市。
是时,适施氏适市。
氏视是十狮,恃矢势,使是十狮逝世。
氏拾是十狮尸,适石室。
石室湿,氏使侍拭石室。
石室拭,氏始试食是十狮。
食时,始识是十狮尸,实十石狮尸。
试释是事。

La première ligne, à lire  Shíshì shīshì Shī Shì, shì shī, shì shí shí shī, se traduit par : "Dans un repaire de pierre se trouvait le poète Shi, qui aimait manger des lions, et décida d'en manger dix".
 
Le nom français de cette fable est "Le Poète mangeur de lions dans son repaire de pierre". Le style est bien affecté, artificiel et archaïque et même les Chinois natifs ne comprennent pas cette pièce sans la lire ou la connaître déjà. Mais cela vaut largement nos "chaussettes de l'Archiduchesse"...




     La langue chinoise (notamment le mandarin) a connu depuis longtemps et jusqu'à aujourd'hui, une multitude de systèmes de transcriptions phonétiques. Nous utilisons ici le pinyin, système adapté à l'alphabet latin et qui est reconnu officiellement par le Gouvernement chinois depuis 1979, par la République de Taïwan depuis 2008. Toutefois, d'autres ont existé et il peut être utile d'en connaître l'existence. Tel est le cas du système Wade-Giles ou du système français, mis au point autrefois par l'E.F.E.O. (École Française d'Extrême-Orient), à la suite des premières tentatives de romanisation de la prononciation chinoise par les missionnaires jésuites dès le XVII° siècle. Ainsi, dans l'ancien système français, très répandu dans la francophonie au XX° siècle, le nom du Président Máo Zédōng (毛泽东) se transcrivait Mao Tsé Toung et celui du Philosophe Lǎozǐ (老子) s'écrivait Lao Tseu. Les équivalences sont parfois curieuses à comparer : le nom de l'Historien des Hans, Sīmǎ Qiān (司馬遷) s'écrivait dans l'ancien système français Sseu Ma T'sien...

     Votre serviteur n'abordera pas ici la question très complexe des transcriptions que les voisins de la Chine ont pratiqué par le passé et encore aujourd'hui, à commencer par les Japonais et les Coréens. Signalons seulement le système Bopomofo, dénommé en chinois 注音符号 (zhùyīn fúhào). C'est un système entièrement alphabétique (phonétique)  de notation du mandarin, système aujourd'hui abandonné en Chine Populaire mais encore pratiqué à Taïwan, notamment en dactylographie. Il est composé de 37 lettres (c'est-à-dire les 21 consonnes, 4 voyelles simples, 4 diphtongues, 5 finales vocalisées et 3 initiales, les liquides citées plus haut). Il tient son nom des quatre premières consonnes BPMF.

 
Bopomofo.png

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bapamafa.png

Alphabet Bopomofo

(Sources Wikipédia français - artice Bopomofo)

L'ordre de tracé des traits est indiqué par les couleurs :

le rouge en premier, le vert en second, le bleu en dernier.

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