SURRÉALISME
vu par André BRETON
André BRETON Manifeste du Surréalisme 1924
4° De l’instant où il sera soumis à un examen méthodique, où, par moyens à déterminer, on parviendra à nous rendre compte du rêve dans son intégrité (et cela suppose une discipline de la mémoire qui porte sur des générations ; commençons tout de même par enregistrer les faits saillants), où sa courbe se développera avec une régularité et une ampleur sans pareilles, on peut espérer que les mystères qui n’en sont pas feront place au grand Mystère. Je crois à la résolution future de ces deux états, en apparence si contradictoires, que sont le rêve et la réalité, en une sorte de réalité absolue, de surréalité si l’on peut ainsi dire. C’est à sa conquête que je vais, certain de n’y pas parvenir mais trop insoucieux de ma mort pour ne pas supporter un peu les joies d’une telle possession.
On raconte que chaque jour, au moment de s’endormir, Saint-Pol-Roux faisait naguère placer sur la porte de son manoir de Camaret, un écriteau sur lequel on pouvait lire : LE POÈTE TRAVAILLE.
Il y aurait encore beaucoup à dire mais, chemin faisant, je n’ai voulu qu’effleurer un sujet qui nécessiterait à lui seul un exposé très long et une toute autre rigueur ; j’y reviendrai. Pour cette fois, mon intention était de faire justice de la haine du merveilleux qui sévit chez certains hommes, de ce ridicule sur lequel ils veulent le faire tomber. Tranchons-en : le merveilleux est toujours beau, n’importe quel merveilleux est beau, il n’y a même que le merveilleux qui soit beau.
Dans la série folio essais n° 5, Gallimard 1987 pages 24/25.
Souligné par le scribe.
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