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Démographie de la Chine et son intérêt pour l'Histoire

 

    La Chine est tout d'abord caractérisée par une démographie exceptionnelle : le pays est le plus peuplé au monde (l'évaluation de sa population pour 2022 se monte à 1,448 milliards d'individus, devant la République de l'Inde avec environ 1,407 milliards d'individus estimés pour la même année, loin devant les autres nations). Outre cet effectif, la démographie de la Chine montre d'autres caractéristiques, parmi lesquelles :

- l'importance de l'ethnie Han par rapport à toutes les autres,

- la concentration de la population sur une seule petite moitié du pays,

- une pyramide des âges bouleversée depuis un siècle.

    Pour rappel, signalons qu'il n'existe pas d'unité géographique du pays. De la Mer orientale aux grands déserts occidentaux, des montagnes du Sud Ouest aux grandes steppes du Nord, en passant par les riches plaines fluviales du centre, la Chine regroupe une variété presque infinie de paysages et d'unités géographiques. Il en est de même du climat : de la mousson du Sud-est aux déserts du Nord-ouest, la Chine ne présente pas d'unité géographique. 

    Cette évocation rapide de la Chine s'intéresse à la géographie humaine de la Chine. Celle-ci est caractérisée par la prédominence sans partage de l'ethnie Han ( : 1,5_milliards d'individus dans le monde, dont 1,2 dans la seule Chine populaire, où elle repréente 92% de la population du pays). Face à cette part léonine, le reste de la population chinoise se répartit en 55 ethnies minoritaires (comptant chacunes de 16 millions à 3 000 individus). Il est donc possible d'affirmer que l'unité de la Chine est due à l'unité de sa population. Il y a cinq millénaires, les Huaxia (华夏 : ancêtres des Hans) vivent dans la région du Fleuve jaune (黃河 : Huáng Hé), d'où ils s'étendent tout au long des siècles sur toute la moitié orientale du pays actuel. L'écrasante majorité de toute la population chinoise vit à l'est de la "ligne Heihe-Tengchong" (黑河-腾冲线), diagonale qui relie la pointe nord-est de la frontière avec la Sibérie russe et la frontière sino-birmane : la moitié orientale de cette diagonale recense aujourd'hui 43 % de la superficie du pays et 94 % de sa population.

 

 

La diagonale schématise la différence de densité de populations,

laquelle est illustrée par l'éclairage nocturne sur ce montage de photos satellites

(images Wikipédia).

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   D'autres documents démographiques complètent la description historique (récente) et géographique de la Chine contemporaine. L'étude comparative des pyramides des âges révèle les nombreux traumatismes de la population chinoise durant le dernier siècle.

     La pyramide des âges de la Chine en 1953, soit quatre ans après la victoire à Pékin de Mao ZeDong, illustre bien les traumatismes de la populaton chinoise depuis la fin du XIX° siècle.

 

 

Source Wikipédia (article français Démographie de la Chine).

     Deux phénomènes apparaissent au premier regard sur ce graphique : La pyramide des âges est "en forme de pagode", c'est-à-dire que sa base est très large par rapport à son sommet. Le schéma est caractéristique d'un pays très jeune, à la démographie très active, souvent comparée à celles explosives des pays du Ters-Monde. Ce pays accroît sa population à un rythme très rapide. Cette tendance juvénile et très nataliste est à l'origine de la "politique de l'enfant unique" qui s'est imposée dans ce pays dans les décennies successives. Par ailleurs, l'on remarque de vastes échancrures, plus marquées coté masculin que féminin pour les tranches d'âge de 8 à 18 ans. Cette particularité correspond à des déficits de naissances entre 1937 et 1945 : la période est caractérisée par l'invasion de la Chine par les armées japonaises et le si terrible conflit sino-japonais. 

     L'examen précis de cette pyramide des âges (celle de la Chine en 1953) révèle des séquelles d'autres drames, comme la dénatalité des années 1909 à 1913 (pour les Chinois âgés de 40 à 44 ans en 1953) : la période correspond au crépuscule de la dynastie Qing (après l'assassinat de l'Empereur GuangXu et la mort troublante de l'Impératrice douairière CiXi les 14 et 15 novembre 1908), jusqu'à la révolution XinHai (d'octobre 1911 à février 1912), au renversement de l'Empire et la proclamation de la République de Chine par Sun YatSen (29 décembre 1911 et 1er janver 1912). Un examen plus méticuleux encore laisse deviner les traces d'une ancienne dénatalité en 1884 (quand l'armée coloniale française détruit la marine de guerre chinoise dans le cadre de la guerre fraco-chinoise et de la conquête du Vietnam) puis en 1894 (première guerre sino-japonaise). Enfin, l'on constate un net recul de la natalité chinoise en 1953 : il correspond à un très net recul de sympathie de la population chinoise à l'égard du nouveau gouvernement communiste et au lancement des campagnes des "trois anti et des cinq anti" (de 1951 à 1952, "contre les capitalistes chinois").

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    D'autres développements de l'Histoire contemporaine peuvent être repérés par la comparaison tous les dix ans des différentes pyramides des âges. Les schémas figurant ci-dessous présentent pour la Chine les pyramides des âges des années 1990, 2000, 2010 et 2020.

 

Sources : Wikipédia en français, article Démographie de la Chine

     Ces quatre graphiques juxtaposés révelent une mutation profonde de la démographie chinoise. Le graphique de 1990 laisse voir encore l'ancienne forme de la pyramide en pagode des années 1940 et 1950. La structure est marquée par trois traumatismes : celui des années 1930 et 1940, présenté ci-dessus, est encore bien visible, bien qu'il commence à s'estomper. Les témoins directs de ces décennies ont alors entre 40 et 50 ans.  

     La pyramide des âges de 1990 laisse voir d'immenses"classes creuses", répondant au nombre d'enfants et de jeunes gens entre 4 et 21 ans, de même que dans la classe d'âge des Chinois de 29 à 32 ans. Celle-ci correspond aux naissances des années 1958 à 1961 : c'est la période de la "Grande Famine de trois ans" (三年大饥荒sān nián dà jī huāng), qi a vu la mort par la faim d'au moins 15 millions de personnes. Le PCC a reconnu en 1981 que cette calamité a été provoquée par les erreurs du "Grand Bond en avant" et des campagnes "anti-droitistes" dues aux "Communes populaires".

 

      Une deuxième série de dénatalité, correspond continûment aux années 1969 à 1986. Cette crise, dès 1969, suit la fin de la Révolution culturelle et la reprise en main, par l'Armée populaire de libération, de la situation politique. La fin de la dénatalité en 1986 correspond au second souffle de la réorientation de la politique voulue par Deng XiaoPing dès 1978, durant les trois premières années du programme "Réforme et ouverture" (改革开放Gǎigé kāifàng). Cette embellie s'arrête brusquement durant l'année de la crise de la Place Tien An Men, en 1989. Une nouvelle crise de dénatalité commence, particulièrement grave, empirant jusqu'en 1999, avant de se résorber lentement jusqu'en 2015, avant une rechute depuis 2018 (année marqué par les réformes constitutionnelles de Xi JinPing et le début de la guerre commerciale entre les États Unis d'Amérique et la République Populaire de Chine).

     Il est sans doute trop tôt pour tirer des conclusions définitives de l'étude des pyramides des âges les plus récentes. Mais l'on constate la grande corrélation entre les crises de natalité du XX° siècle chinois et les grandes crises de la vie politique de cette grande puissance (guerres civiles ou étrangères, disettes et famines, crise politiques internes). 

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